Gens du Voyage pendant la guerre : la double peine !

26/08/2025

Gens du Voyage pendant la guerre : la double peine !

Les historiens, sociologues, spécialistes des questions tsiganes ne disposent pas d'éléments sûrs et tangibles sur la déportation dont les Gens du Voyage ont fait l'objet, en Europe, donc y compris en France, pendant la Seconde Guerre mondiale. Mais il apparaît comme probable que près de 25 % de la population voyageuse européenne ont été déportés ou exterminés. Un Tsigane sur quatre. Au vu du grand des membres qui les composent, aucune famille n'a été épargnée. Ceux qui ont pu éviter les camps de concentration ou l'extermination, ont été confinés dans des camps d'internement (ce fut le cas en France), où même sans fours crématoires, le taux de mortalité était très élevé. D'aucuns pourraient dire que ce furent des zones de parcage en attendant la tournure que prendrait la guerre. D'autres, opteront pour les considérer comme des mouroirs. Au-delà de la déportation, de l'internement ou de la mort, il y a eu au préalable, la spoliation des biens appartenant aux Gens du voyage. Spoliation, vol, appropriation violente et illégale du bien d'autrui. Du jour au lendemain vous n'êtes plus rien, vous n'avez plus rien. 

Les historiens, sociologues, spécialistes des questions tsiganes ne disposent pas d'éléments sûrs et tangibles sur la déportation dont les Gens du Voyage ont fait l'objet, en Europe, donc y compris en France, pendant la Seconde Guerre mondiale. Mais il apparaît comme probable que près de 25 % de la population voyageuse européenne ont été déportés ou exterminés. Un Tsigane sur quatre. Au vu du grand des membres qui les composent, aucune famille n'a été épargnée. Ceux qui ont pu éviter les camps de concentration ou l'extermination, ont été confinés dans des camps d'internement (ce fut le cas en France), où même sans fours crématoires, le taux de mortalité était très élevé. D'aucuns pourraient dire que ce furent des zones de parcage en attendant la tournure que prendrait la guerre. D'autres, opteront pour les considérer comme des mouroirs. Au-delà de la déportation, de l'internement ou de la mort, il y a eu au préalable, la spoliation des biens appartenant aux Gens du voyage. Spoliation, vol, appropriation violente et illégale du bien d'autrui. Du jour au lendemain vous n'êtes plus rien, vous n'avez plus rien. Les chances de survie dans de telles conditions ? Là, non plus, l'Histoire est démunie pour en apporter les éléments suffisamment clairs et constitutifs, ce qui ne veut pas dire qu'elle nie pour autant ces événements. Mais dans un tour de passe-passe dialectique, le fait de ne pas nier n'empêche pas de minimiser, relativiser, voire réduire à sa portion congrue. Car après ce premier niveau de discrimination lié à leur déportation, internement ou extermination, s'ajoute celui de la non-reconnaissance officielle, ou en tout cas, pleine, de ces derniers. Après la guerre, les Nations Unies ont pourtant décrété que les pays concernés par ces faits, devaient procéder à des programmes de dédommagement pour les descendants des victimes des persécutions nazies, en y incluant donc les Gens du Voyage. La réaction a été lente. Après plus de deux décennies de mémoire oublieuse, l'Allemagne (République fédérale à l'époque) a reconnu sa responsabilité. Mais partielle car elle ne concernait (et ne concerne toujours) que les déportations et exterminations entre 1943 et 1945. Quid des précédentes, sachant que comme pour tous les autres groupes communautaires victimes du nazisme, les spoliations, passages à tabac, déportations et internements avaient commencé en 1939, voire avant ? Cette semi-reconnaissance a tout du moins le mérite de représenter un pas en avant pour enfin un jour écrire l'Histoire telle qu'elle fut. D'autres pays ont suivi les attendus des Nations-Unies... D'autres pays, sauf un... Et oui, la France a mis plus de 60 ans à reconnaître, d'une voix un peu enrouée, sinon la réalité, l’ampleur du génocide tsigane. Dans les années 2000, cela devait entraîner des compensations financières. Nombreux collectifs ont alors appuyé cette démarche, et non des moindres, avec la participation du Défenseur des Droits, autorité indépendante, ou de la LICRA. Un engagement citoyen, militant et pluriel pour arriver en septembre 2020, à une fin de non-recevoir de la part des sages du Conseil d’État, à toute demande visant à ouvrir la voie à un processus d’indemnisation des familles tsiganes, victimes de spoliation durant la Seconde Guerre mondiale. Les raisons de cette décision sont nombreuses et longues à détailler. Certaines relèvent la non-systématisation des persécutions à l'encontre des Tsiganes, contrairement aux Juifs ou à d'autres groupes-cibles (communistes, homosexuels, Témoins de Jéhovah). D’autres rappellent à l’envi que la France d'après-guerre n'était pas celle du régime vichyste et n'avait pas à assumer une quelconque responsabilité pour des actes qu'elle n'avait pas commis. Quoi qu'il en soit, la situation est là et bloquée. Et elle aboutit à un deuxième niveau de discrimination contre les Gens du Voyage. La non-reconnaissance d’atrocités qui ont décimé des familles, réduit d’un quart une composante humaine européenne, sauvagement battus et assassinés des individus, après les avoir dépouillé de tout (ou du peu) qu’ils possédaient, réduit d’un quart un groupe humain, européen depuis cinq siècles. Nous le répétons, toute victime, quelle qu’elle soit, mérite compensation. Nous pourrions même nous contenter de « respect ». Mais dans cette affaire comme dans d’autres, cette logique relevant des Droits inaliénables de l’Homme semble échapper aux monde des Gens du Voyage.

 

Daniel-Emile MILLIER, Directeur de l'Association Régionale Gens du Voyage-Gadjé de Bourgogne Franche-Comté 

 

Photo d'illustration : Roms entourés par des gendarmes à Noyon (Oise). Archives départementales de l’Oise, 2 UP 584 © D. R.